Il y a quelques années on n’aurait jamais imaginé se poser la question, mais aujourd’hui, avec l’évolution de la technologie cette question ne semble plus aussi aberrante.
Néanmoins, cette interrogation ne manque pas de faire débat. L’état actuel du droit français ne permet toujours pas à une personne morale d’être reconnue, dès l’origine, comme auteur d’une œuvre. Elle ne peut être que la titulaire des droits d’auteur sur une œuvre collective. Cette conception du droit peut paraître logique puisque derrière l’entreprise se cache une personne physique à l’origine de l’œuvre. Mais que faire des œuvres créées par le biais d’une intelligence artificielle ?
Le problème ne se pose plus pour les œuvres qui ont été créées avec l’aide d’un ordinateur. La cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 31 janvier 2005, a posé le principe « qu’une œuvre de l’esprit même créée à partir d’un système informatique peut bénéficier des règles protégeant les droits d’auteur, à condition qu’elle laisse apparaître même de façon minime l’originalité qu’a voulu apporter son concepteur ». La condition pour qu’une œuvre puisse donc bénéficier de la protection des droits d’auteurs est que celle-ci fasse apparaître une originalité de son concepteur. Dans ce cas précis, le droit d’auteur est au bénéfice de la personne et non de la machine.
Mais, prenons maintenant l’exemple des robots capables de créer de façon autonome une « œuvre ». Lors des dernières élections législatives françaises de décembre 2015, certains médias français ont utilisé des robots pour rédiger des articles courts sur les résultats des élections. Ils disposaient d’un algorithme leur permettant d’effectuer des recherches et de sélectionner les informations pertinentes. Les articles n’étant pas tous similaires, leur création peut donc sembler autonome. S’agit-il pour autant d’une œuvre de l’esprit ?
L’œuvre de l’esprit se définit comme étant une création intellectuelle originale rendue matérialisée sur un support tangible. Si dans le cas d’œuvre de robot la condition de matérialisation est remplie, il est plus délicat d’y reconnaître une création intellectuelle. En effet, il est peu probable que l’œuvre obtienne cette qualification malgré le degré d’autonomie de la machine. Le droit sur l’œuvre sera donc au bénéfice du créateur de l’algorithme à la condition qu’elle soit qualifiée d’originale. En l’absence d’originalité l’œuvre ne sera donc pas protégeable. Le droit français, ne permet pas donc pas, en l’état, aux robots d’acquérir un droit d’auteur sur leurs œuvres.
L’Union européenne réfléchit également aux difficultés émanant de l’absence de droit des robots en matière de droit d’auteur. Cependant, la commission estime « qu’à l’heure actuelle la technologie ne permet pas de donner aux robots un degré suffisant d’autonomie leur permettant d’acquérir une personnalité juridique ». Mais, elle reste persuadée que dans un futur proche cette question devra être traitée et elle a donc mis en place plusieurs projets de recherche dans ce cadre.
Il est certain que l’autonomie grandissante des robots sera à l’origine de nombreuses réformes aussi bien au niveau du droit d’auteur que des régimes de responsabilité juridique. En attendant, la protection des œuvres de l’esprit reste un privilège réservé aux humains.
Aurélie Costa