Par deux fois, en Division d’opposition puis en Chambre d’appel, l’Office d’Harmonisation du Marché Intérieur (OHMI, désormais EUIPO) [1] a rejeté la demande d’opposition faite par The Polo/Lauren Company à l’encontre de l’enregistrement d’une marque communautaire par FreshSide Limited. En dépit de ces refus, The Polo/Lauren Company a porté l’opposition devant le Tribunal de l’Union Européenne.
Ce dernier vient de fait droit à l’opiniâtreté du fameux créateur de vêtements par un arrêt en date du 18 septembre 2014 [2]. Les juges de Luxembourg ont considéré qu’un signe représentant un joueur de polo à vélo prêt à frapper la balle ressemblait un peu trop à un signe représentant un joueur de polo à cheval également prêt à frapper la balle !
Les agents de l’OHMI dans le souci du détail avaient préféré à une analyse d’ensemble une étude approfondie des signes en présence. Ils concluaient que bien que les signes présentent certaines similarités, comme leur représentation en noir et blanc ou l’absence de représentation détaillée des traits du joueur de polo, la monture restait l’élément dominant du signe, directement et clairement remarquable. La direction de mouvement des cavaliers ou du cycliste ainsi que la différence entre les sports représentés faisaient également pencher la balance en faveur d’une absence de similarité visuelle et conceptuelle.
La question se posait donc de savoir si le consommateur apercevant la marque serait enclin à penser que les produits viennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement ? Retiendrait-il plus les différences de montures ou la similarité des sports représentés ?
Les juges du Tribunal optent pour une approche différente de celle de l’OHMI. Ils prennent le temps de reculer d’un pas et d’analyser l’impression d’ensemble des signes qui restera en mémoire des consommateurs.
Le Tribunal rappelle à juste titre que le consommateur, qui n’a que trop peu l’occasion de comparer les signes directement, se souviendra de l’allure des joueurs de polo, de leur action en mouvement, de leur maillet en l’air. Il ne procèdera pas à une analyse détaillée des différences entre les signes.
Pour le Tribunal cela ne fait aucun doute l’impression globale des signes est trop proche pour ne pas conclure à un degrés de similarité conceptuelle et visuelle.
Le vélo ne serait ainsi qu’un simple accessoire du polo. La présence du sportif prêt frapper la balle avec son maillet déjà en l’air tend à estomper la différence de sa monture sur le plan visuel. Par ailleurs, le polo à vélo n’est qu’un sport émergent et cela ne suffit pas à effacer toutes ressemblances conceptuelles avec le polo traditionnel. Ainsi, malgré la différence de montures, les ressemblances conceptuelles entre les signes persistent en ce que les sports représentés sont très proches.
Cette reconnaissance d’un degrés de similarité même faible permet au Tribunal d’annuler la décision de la Chambre d’appel et de renvoyer l’affaire à Alicante pour une décision … moins dans le détail!
Qu’on se le dise, à cheval ou à vélo les joueurs de polo ont la même allure !
Camille Rideau
[1] Arrêt de la 2e Chambre d’Appel, 01/03/2013, R 15/2012-2
[2] Arrêt du Tribunal, 18/09/2014, T-265/13